16/09/2025

Repérer à temps la presbyacousie : décrypter les premiers signaux de l’audition qui baisse

Qu’est-ce que la presbyacousie ?

La presbyacousie désigne la perte progressive de l’audition liée à l’âge. Il s’agit d’un phénomène naturel, quasiment universel au-delà de 60 ans, mais dont l’apparition peut varier d’une personne à l’autre. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) estime que plus de 65 % des personnes de plus de 60 ans présentent une certaine forme de presbyacousie (OMS).

Cette atteinte touche généralement les deux oreilles et débute subtilement, d’abord sur les sons aigus. Elle est liée à la dégénérescence progressive des cellules sensorielles de l’oreille interne (cellules ciliées) et parfois à d’autres facteurs comme la génétique, l’exposition au bruit, des pathologies ou certains traitements médicaux. En France, selon les chiffres de l’Inserm, la presbyacousie concerne environ 6 millions de personnes, souvent sans qu’elles en aient pleinement conscience.

Un vieillissement de l’audition qui s’installe discrètement

La particularité de la presbyacousie est sa progressivité. Elle s’installe souvent sur plusieurs années, passant inaperçue dans la vie de tous les jours. Alors qu’une perte brutale d’audition est immédiatement repérable, la presbyacousie avance masquée, car le cerveau s’adapte lentement à la diminution des signaux sonores. De fait, de nombreuses personnes adaptent leur comportement sans s’en rendre compte, ce qui retarde la prise de conscience et la consultation.

C’est pourquoi repérer les premiers changements auditifs est crucial pour prévenir l’isolement, la fatigue et les risques associés à la perte auditive non traitée.

Les tout premiers signes à ne pas négliger

  • Difficulté à comprendre dans le bruit : Un des indices majeurs. Lors de repas dans un restaurant, en famille ou entre amis, la compréhension devient plus laborieuse, surtout lorsque plusieurs personnes parlent en même temps.
  • Mots qui “s’effacent” : On a l’impression que certains mots ou bouts de phrases sont avalés, surtout avec les voix aiguës ou d’enfants.
  • Augmentation du volume des appareils : Augmenter régulièrement le son de la télévision ou de la radio devient une habitude. Souvent, l’entourage s’en aperçoit avant la principale personne concernée.
  • Sensation d’oreilles “bouchées” : Moins marquée qu’avec un rhume, elle peut apparaître occasionnellement, sans douleur ni cause évidente.
  • Fatigue accrue lors des discussions : L’effort pour suivre une conversation, même en tête-à-tête, entraîne parfois une sensation de lassitude, une envie de se retirer ou de ne plus suivre certains échanges.

Diversité des situations où la presbyacousie se manifeste

Si la perte auditive se révèle très progressive, elle va d’abord toucher certains contextes de la vie courante :

  • Environnement bruyant : Les restaurants, réunions de famille vibrantes ou marchés animés deviennent sources de frustration, car il devient difficile de suivre plus d’un interlocuteur.
  • Utilisation du téléphone : Les échanges téléphoniques paraissent moins clairs, les voix sont perçues comme lointaines ou peu distinctes, en particulier avec des téléphones non équipés de haut-parleur performant.
  • Comprendre les enfants : Les voix aiguës, celles des enfants ou des femmes, sont les premières concernées car ce sont les fréquences élevées qui “partent” en premier dans la presbyacousie.
  • Délais de réaction : Réagir trop tard à un appel, ne pas répondre quand on se fait interpeller depuis une autre pièce, ou ne pas percevoir certains sons du quotidien (clochettes, signal du micro-ondes, etc.).

Pourquoi la presbyacousie est-elle si souvent sous-estimée ?

La presbyacousie touche très progressivement l’acuité auditive : ce sont les sons aigus (au-dessus de 2000 Hz) qui s’amenuisent en premier. Or, la parole humaine concentre beaucoup d’informations dans ces fréquences – comme les consonnes “s”, “f”, “ch”, qui structurent le mot.

Le cerveau réalise un “remplissage automatique” en complétant les sons manquants à partir du contexte. Cette capacité, appelée “redondance lexicale”, retarde la prise de conscience. De plus, beaucoup assimilent la perte auditive au fait de “ne plus entendre fort” : ici, la presbyacousie concerne d’abord la clarté de ce que l’on entend, pas le volume.

Selon une enquête menée par l’Institut IFOP en 2022 pour JNA (source : JNA), moins de 40 % des personnes interrogées ayant un trouble avéré avaient consulté un professionnel, la plupart sous-estimant l’impact de leurs difficultés.

Comment différencier la presbyacousie d’autres formes de perte auditive ?

  • Symétrie : La presbyacousie touche toujours les deux oreilles à des degrés très voisins, contrairement à de nombreuses pertes auditives traumatiques ou soudaines.
  • Progressivité : Elle évolue sur plusieurs années. Une perte brutale ou unilatérale doit alerter et faire rechercher d’autres causes (surdité brusque, bouchon, infection...).
  • Absence de douleur : La presbyacousie se déroule sans douleur, ni sensation permanente d’oreille bouchée, ni écoulement ou fièvre, ce qui permet souvent de l’écarter d’affections plus aiguës.

Il est essentiel d’éliminer toute cause mécanique (cérumen, otospongiose, infection de l’oreille) ou générale (effet secondaire médicamenteux, pathologie métabolique) lors d’une baisse auditive, même progressive.

La parole aux proches : détecter les signaux d’alerte

Dans de nombreux cas, ce sont les proches qui amènent la personne à consulter, car ce sont eux qui se rendent compte de comportements nouveaux :

  • Répétition fréquente des mêmes questions ou demande de redire plusieurs fois une phrase.
  • Tendance à se replier lors de réunions conviviales, refus d’aller dans les environnements sonores.
  • Réglage du volume des appareils nettement plus élevé qu’auparavant – entre 10 et 20 % des personnes âgées équipées d’une TV sonore adaptée ont été orientées par leur entourage (source : rapport Drees 2021, Drees).

Certains indices subtils doivent également alerter : évolution des habitudes sociales (moins de sorties), apparente distraction voire irritabilité lors des conversations. La fatigue et les maux de tête en fin de journée après des discussions prolongées sont aussi rapportés par plusieurs études (voir Fondation pour l’Audition, Fondation).

Des conséquences insidieuses sur la qualité de vie

La presbyacousie impacte silencieusement la vie quotidienne. Plusieurs études longitudinales, notamment celles publiées dans The Lancet ou par la Fondation pour la Recherche Médicale, soulignent le lien entre perte auditive et dégradation des fonctions cognitives, augmentation du risque de isolement social, dépression, et accidents domestiques.

  • Isolement : 30 à 50 % des personnes présentant une perte auditive non corrigée déclarent éviter les interactions sociales régulières (source : Fondation pour la audition).
  • Risque de chute accru : Une étude américaine de 2012 (JAMA Internal Medicine) a montré que les personnes atteintes de perte auditive modérée avaient un risque de chute augmenté de 3 fois par rapport à leurs pairs mieux entendants.
  • Effort cognitif et fatigue : L’énergie déployée pour comprendre la parole nuit à la mémoire de travail et à la concentration – ce que l’on appelle la “charge cognitive” – accentuant ainsi les difficultés au fil du temps.

Quand consulter ? À chacun son rythme, mais quelques signaux forts

  • Si vous ressentez l’un des signaux évoqués plus haut, même ponctuellement, il est pertinent de solliciter un dépistage auditif auprès de votre médecin ou d’un audioprothésiste.
  • L’âge moyen d’apparition des premiers symptômes se situe autour de 55-60 ans, mais une consultation précoce, dès le moindre doute, permet d’agir en prévention.
  • En Seine-Saint-Denis comme ailleurs, le bilan auditif est accessible, rapide (quelques minutes), sans douleur ni risque. Il ne nécessite pas d’engagement ni d’achat.

Il existe aujourd’hui des campagnes de dépistage gratuites dans de nombreux centres municipaux et maisons de santé. Plusieurs initiatives locales (par exemple, les journées de l’audition ou des ateliers seniors) proposent chaque année des contrôles et des informations adaptées.

Il est recommandé d’effectuer, dès l’âge de 60 ans, un bilan auditif tous les deux ans (source : Haute autorité de Santé, HAS).

Préserver son audition au fil des années : quelques repères

Même si la presbyacousie est un phénomène naturel, il est possible d’en ralentir l’évolution et de préserver au mieux son audition :

  1. Éviter l’exposition prolongée au bruit : Limitez le volume des appareils sonores et portez des protections auditives lors d’expositions bruyantes.
  2. Adopter une hygiène de vie favorable : Des études ont montré que les facteurs cardiovasculaires (hypertension, diabète, cholestérol) influencent la santé auditive. Le contrôle de ces facteurs contribue à ralentir la perte.
  3. Ne pas hésiter à consulter : Plus un trouble auditif est détecté tôt, meilleures sont les chances de bien s’adapter à une aide auditive si nécessaire.
  4. Stimuler l’oreille et le cerveau : Rester actif socialement, pratiquer des activités de groupe, et entretenir sa curiosité sont des leviers puissants contre l’aggravation de la perte et de ses conséquences.

Vers une prise en charge précoce, pour maintenir la qualité de vie

Identifier les premiers signes de la presbyacousie n’est pas toujours simple, mais c’est la clé d’un accompagnement réussi. Savoir repérer les situations à risque, écouter les remarques de l’entourage et s’informer régulièrement, c’est déjà un grand pas pour maintenir le lien social et préserver ses capacités cognitives. L’audition, comme la vue ou la santé bucco-dentaire, mérite d’être surveillée tout au long de la vie. En Seine-Saint-Denis comme ailleurs, des solutions et des ressources existent, et il n’y a aucune fatalité à mal entendre avec l’âge. N’hésitez pas à en parler à vos professionnels de santé ou à profiter des actions de dépistage près de chez vous.

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